DESC MEDECINE D’URGENCE


Un mannequin plus vrai que nature pour les urgences

A l’hôpital Cochin, les internes des urgences reçoivent une formation high-tech grâce à un mannequin androïde, bourré d’électronique. Une expérience que l’équipe souhaite pouvoir généraliser, au bénéfice des patients.

« On vous amène un patient aux urgences, il est dans le coma, ce sont les pompiers qui le déposent, ils vous expliquent qu’ils l’ont trouvé à tel endroit, voici les données de transmission »… comme dans un jeu de rôles, le formateur explique aux jeunes urgentistes la situation à laquelle ils sont confrontés, avant de les lancer dans le grand bain. Mais il ne s’agit pas d’un jeu : cette formation d’un nouveau genre est destinée à renforcer la sécurité des patients, en permettant une confrontation hyperréaliste avec des situations particulièrement difficiles, une mise en pratique de connaissances techniques et une gestion de crise sans aucun risque pour les patients. Dans la salle, trois formateurs encadrent les internes : deux d’entre eux donnent les consignes et recadrent les médecins au besoin, tandis que le troisième fait l’acteur en se moulant dans la peau, au choix, d’un infirmier, d’un externe, ou d’un proche du « patient ».

12 minutes pour une vie

En réalité, le « patient » est un mannequin à forme humaine, à qui la technologie permet de « respirer » en soulevant son torse, de reproduire certaines expressions du visage, voire de porter des blessures ou des signes de maladie qu’il faudra reconnaître. On peut le ventiler, le suturer mais aussi prendre son pouls, lui appliquer un choc électrique pour faire repartir son cœur, ou lui injecter des médicaments. Pour permettre cette simulation, un technicien s’active derrière une console, elle-même cachée aux participants par un paravent : il peut provoquer des réactions « physiologiques » chez le mannequin, auxquelles l’équipe de jeunes médecins devra répondre sans délai. Le mannequin peut ainsi simuler un infarctus, une raideur de la nuque (signe possible de méningite) ou un trismus (paralysie faciale). Durant une simulation de 12 minutes en moyenne, les participants doivent à la fois soigner au mieux le « patient » et gérer leur environnement. Le Dr François Lecomte, médecin urgentiste et instructeur à Cochin (AP-HP) où se pratique la formation, évoque « les situations rares, qu’on peut reproduire à l’infini sans aucun dommage pour le patient… », mais aussi « les situations cocasses, l’externe qui ne sait pas quoi faire, la famille qui panique… » – autant de paramètres qui dépassent l’enseignement traditionnel de la médecine.

© AP-HP (PAMtv)

Une formation d’avenir ?

Encore peu développée en France – le Dr Lecomte a ramené d’une année de recherche à Toronto, au Canada, le principe de simulation et a dû aller passer à Londres son diplôme d’instructeur européen – la médecine sur simulateur se situe à mi-chemin entre l’apprentissage théorique de la faculté et les stages pratiques dans les services de soins. « Les séances comportent trois temps », explique François Lecomte, « le briefing du début, la simulation proprement dite, et le plus important : le debriefing ». Ce dernier permet aux participants d’exprimer leur ressenti, aux formateurs de rappeler les bonnes pratiques, et à tous de repartir avec un enrichissement de leur pratique, après analyse sur vidéo de l’ensemble de la simulation. Grâce à un partenariat avec un industriel qui fournit le matériel et les ressources humaines, le service des urgences de Cochin forme depuis 1 an 1/2 l’ensemble de ses internes, qui plébiscitent cet outil. Un diplôme universitaire francophone de Formateurs à l’Enseignement de la Médecine sur Simulateur a été créé à l’université Paris Descartes, tandis que Paris 7 forme les urgentistes eux-mêmes. A terme, le Dr Lecomte espère pouvoir obtenir l’ouverture par les universités de centres de simulation complets tel qu’ils existent dans d’autres pays (en Suisse, Belgique, Allemagne, Angleterre ou Italie), et qui offrent la possibilité de former les médecins, les infirmières et de tester une gamme infinie de situations de soins, depuis l’accouchement jusqu’à la prise en charge de victimes d’attentats chimiques

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